Quand tu rompis ta lance à la porte d'Elvire,
T'en souviens-tu, dis-moi, du beau temps qu'il faisait?
Et les yeux, des remparts, au loin, qui te suivirent
Te semblaient des fruits noirs saignant aux cerisaies.
Au paysage énorme, à ta course ouvert comme
Un miroir où se heurte et s'étonne le vent,
T'en souviens-tu, dis-moi, des chevaux et des hommes,
Et de l'immense orgueil d'être jeune et vivant?
T'en souviens-tu, dis-moi, quand tu rompis ta lance
Au sortir de Grenade, et du pressentiment
Qui fis, dans ton armée, un moment de silence,
Et posa sur ton front sa pâleur, un moment.
Mais déjà les tambours menaient la promenade,
Et les sloughis rivalisaient avec le feu…
Quand tu rompis ta lance
Au sortir de Grenade,
Le ciel laissa tomber son grand bouclier bleu.